Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 2.djvu/247

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Le seul Voiture, qui n’aimoit pas la foule, ou qui peut-être ne vouloit point être comparé, ne fit pas un pauvre madrigal ; il est vrai que les chiens de M. de Montausier et les siens n’ont jamais trop chassé ensemble. Mais cela ne vient pas de là seulement, car à la mort du marquis de Pisani, son grand ami, il ne fit rien non plus, quoique tant de gens eussent fait des vers.

Notre marquis, voyant que sa religion étoit un obstacle à son dessein, en change. Il dit qu’on se peut sauver dans l’une et dans l’autre ; mais il le fit d’une façon qui sentoit bien l’intérêt[1]. Il traite des gouvernements de M. de Brassac[2], mari de sa tante, pour deux cent mille livres. Il eut bien du bonheur en cette affaire, car M. de Brassac étant tombé malade, madame d’Aiguillon, qui vouloit servir Montausier, pour le faire épouser à son amie, fit en sorte auprès du cardinal Mazarin, sur l’esprit duquel elle avoit alors du pouvoir, qu’on ne scella point les provisions de Montausier, et que Brassac étant mort de cette maladie, on supprima ces provisions, et on en expédia de nouvelles comme d’un gouvernement vacant par mort. Ainsi les héritiers de Brassac perdirent cent mille

  1. On est surpris que M. Dussault, qui donne à la fois pour motifs de la conversion du duc de Montausier, les doutes que ce dernier avoit conçus sur les erreurs du calvinisme, et l’amour qu’il portoit à mademoiselle de Rambouillet, ait ajouté que cette abjuration, pour son importance, peut être mise au-dessus de celle même de Turenne. L’histoire doit être dépouillée de ces pieuses exagérations, dont on est convenu d’embellir l’oraison funèbre destinée à la chaire chrétienne. (Voyez la Notice sur Charles de Sainte-Maure, duc de Montausier, dans le Choix des Oraisons funèbres ; Paris, Janet, 1820, tom. 2, pag. 404.)
  2. Xaintonge et Angoumois. (T.)