Page:Tannery - Pour l’histoire de la science Hellène.djvu/78

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il serait bien singulier que ce dernier y eût vu une des découvertes essentielles de l’astronomie. Il s’agit bien plutôt de l’inégalité de durée entre les quatre saisons astronomiques, c’est-à-dire les quatre parties de l’année tropique divisée par les solstices et les équinoxes, fait capital, qui démontre immédiatement l’anomalie du mouvement propre du soleil.

Dans les Travaux et Jours, Hésiode décrit, pour le cours d’une année, l’ordre successif des levers et couchers apparents des principales constellations et au milieu intercale les solstices ; c’était à ces phénomènes que les Grecs rapportaient les saisons qu’ils distinguaient, c’était sur eux qu’ils réglaient le changement de leurs occupations ; l’année lunaire, d’ailleurs mal réglée, qu’ils employaient, ne pouvait en effet convenir à cet usage. Hésiode donne d’ailleurs quelques intervalles ; je pense que, dans son poème, Thalès avait complété ces données et qu’il avait d’ailleurs fixé de la même façon les équinoxes, dont Hésiode ne parle pas. L’inégale répartition des solstices et des équinoxes dans l’année ressortait dès lors, et Eudème pouvait dire également (Diog. L., I, 23) que Thalès avait prédit les solstices. Enfin cette explication concorde avec la donnée de Pline (XVIII, 25), d’après laquelle le Milésien aurait fixé le lever du matin des Pléiades au 25e jour après l’équinoxe du printemps.

Des travaux de ce genre, véritables almanachs au point de vue pratique, ont été bien longtemps une des principales préoccupations des astronomes grecs ; chacun laissait son parapegme, comme on disait dès le ve siècle ; il nous en est parvenu de nombreux débris, dont les plus complets figurent à la fin de l’Introduction aux Phénomènes de Geminus. À tous ces parapegmes étaient attachées des prédictions météorologiques ; les vents, les pluies, le tonnerre se trouvaient ainsi annoncés pour tel ou tel jour de l’année sidérale. Déjà la période régulière des vents étésiens se trouve déterminée dans Hésiode ; on essayait de faire davantage.

Thalès était-il entré dans cette voie ? Tout porte à le croire. Cela ressort en propres termes de la jolie historiette d’Apulée (Florid., IV, 18) dont les détails sont précieux ; en tous cas, l’antiquité ne s’est jamais représenté autrement un astronome. Le premier de tous en Grèce aurait-il fait exception ?

Les astrologues de la Chaldée, on le sait, avaient déjà été bien plus loin ; ce n’étaient pas seulement les variations atmosphériques, mais même les événements politiques qu’ils prétendaient faire