Page:Taphanel - Le Théâtre de Saint-Cyr, 1876.djvu/20

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règne de Louis XIV ; il a fait parler de lui dans l’Europe entière ; il a eu pour auditoire l’élite de la cour de France, c’est-à-dire la société la plus délicate, la plus lettrée et la plus polie qu’il y ait eu en aucun temps ; Racine a écrit à son intention deux chefs-d’œuvre, les plus parfaits peut-être de la langue française ; le grand poète s’est fait le régisseur de ce théâtre en miniature, distribuant les rôles, réglant la mise en scène, dirigeant et surveillant les répétitions. Les actrices instruites par lui dans l’art de la Champmeslé qu’il connaissait si bien, surpassèrent, dit-on, en grâces et en talent la Champmeslé elle-même. Jamais l’hôtel de Bourgogne, jamais le Théâtre-Français dans toute sa gloire n’avaient réuni un personnel plus choisi, plus discipliné, plus séduisant. Louis XIV, bien que les années l’eussent rendu sage, n’était certes pas insensible à l’attrait de ces beautés naissantes, de ces « jeunes et tendres fleurs », comme dit Esther, merveilleux produits d’une culture raffinée et savante, en qui se remarquait un piquant mélange de distinction et d’innocence, de coquetterie et de candeur. Il écoutait avec ravissement ces belles jeunes filles chantant et déclamant des vers remplis de ses louanges, et son