Page:Tarde - L’Opposition universelle, Alcan, 1897.djvu/192

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en son enfance guerrière et rurale, mâle et dévote. Dans le déclin d’un peuple, comme d’un homme, la dernière chose qui périt, ce sont les derniers besoins de luxe, les derniers vices qui sont venus se greffer, pour l’abâtardir, sur sa sève jadis vigoureuse.


III

Cela dit sur les oppositions sérielles, qualitatives, de la conscience, demandons-nous s’il y existe aussi des oppositions quantitatives, soit de degré soit de sens dynamique, autres que celles de la croyance et du désir sur lesquelles nous nous réservons de revenir plus loin. Cherchons-les dans la sphère des sensations d’abord, des sentiments ensuite. Nous parlerons de celles des idées et des actions quand nous reviendrons à la dualité fondamentale du moi.

Peut-on dire qu’une sensation, comme telle, abstraction faite des jugements ou des désirs qui s’y joignent, augmente ou diminue d’étendue, de durée, d’intensité soit susceptible, en un mot, de plus et de moins ? La question est discutable, car l’hypothèse où l’on se place est irréalisable à la rigueur : s’il est des sensations qui ne soient ni désirées, ni repoussées, ni agréables, ni pénibles à aucun degré, il n’en est pas qui ne soient perçues, c’est-à-dire qui n’impliquent un ou plusieurs jugements implicites, affirmatifs ou négatifs, assimilateurs ou différenciateurs. Et ne peut-on pas prétendre que l’intensité d’une sensation exprime et mesure sa perceptibilité, autant dire sa crédibilité ? Il y a deux manières d’entendre