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OU RECUEIL D’ÉTUDES

et les autres eurent répandu le sang et fait éclater la rébellion contre le pouvoir exécutif, dès lors ils perdirent l’appui de tout homme qui désire obtenir la liberté d’un peuple par des moyens constitutionnels légaux, et ils méritèrent le plus grand malheur qui pût les affliger, celui de mettre leur patrie sous le joug du despotisme.


Est-ce assez écrasant ?

M. Fréchette représente Papineau comme un homme généreux à l’excès ; or, l’on sait qu’il était remarquablement près de ses pièces, qu’il avait un soin tout particulier, excessif même, de ses propriétés, et qu’il aimait l’argent outre mesure.

Je n’entrerai pas dans l’interminable discussion qui a eu lieu en 1848 sur la question de savoir si Papineau s’est montré lâche à Saint-Denis, ou s’il n’a cédé qu’aux instances de ses amis. Je ferai seulement remarquer qu’un homme de cœur, sous aucun prétexte, n’aurait abandonné les siens au moment du danger comme Papineau l’a fait à Saint-Denis.

Du reste, il ne faut pas croire que le Dr Nelson ait été le premier à accuser Papineau de lâcheté, et que cette accusation n’ait été inventée que dix ans après les troubles. Dès le lendemain de la bataille de Saint-Denis, deux journaux de Montréal, le Populaire et l’Ami du Peuple, accusaient Papineau d’avoir fui honteusement. C’est un point important à noter.

Mais là où M. Fréchette fausse évidemment le caractère de Papineau, c’est lorsqu’il le représente comme hostile à la résistance armée et comme animée de loyauté envers l’Angleterre. À la fin du drame il fait dire à son héros :


Il ne faut pas confondre le peuple anglais avec nos argousins, le bourreau Haldimand avec la grande nation dont le drapeau a promené la civilisation sur la moitié du globe… Le jour n’est pas loin peut-être où l’Angleterre, éclairée sur ce qui se passe ici, appréciera la justice de notre cause, et fera la réparation éclatante et généreuse… Le grand cri de la protestation est jeté. L’Angleterre l’a entendu, et elle nous rendra justice.