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du Directoire. Il déplorait les malheurs du chef de l’Église et demandait naïvement à sa mère : « Comment le bon Dieu peut-il souffrir cela ? le bon Dieu n’est-il pas le maître. » Et la sainte femme répondait à l’enfant que le Pape est persécuté parce qu’il représente Jésus-Christ, l’Homme de douleurs, et qu’il faut prier pour les ennemis du Pape comme Jésus-Christ a prié pour ceux qui l’ont crucifié.

À la mort de Pie VI, le monde catholique fut consterné. Comment un nouveau pape sera-t-il choisi ? se demandait-on. « Est-ce donc vrai, disait le petit Jean-Marie à sa mère, qu’il n’y aura plus de Pape ? Sois tranquille mon fils, répliquait la comtesse Mastaï ; on peut voir des rois mourir et n’être pas remplacés ; mais les papes ne finiront qu’avec le monde. »

Contre toute prévision humaine, Dieu rendit à l’Église un instant de liberté en arrêtant pour un moment la marche de la révolution ; les cardinaux se réunirent à la hâte à Venise et choisirent le successeur de Pie VI. Puis la tempête se déchaîna de nouveau et Pie VII subit le sort de son illustre prédécesseur. Le pouvoir temporel des papes paraissait alors à jamais détruit, tandis que leur souveraineté spirituelle dépendait, humainement parlant, de la volonté de Napoléon Ier. Mais Napoléon est tombé et son prisonnier est rentré en triomphe dans Rome. C’est en étudiant l’histoire de l’Église que l’on se pénètre de la vérité des paroles du Christ : « Les portes de l’enfer ne prévaudront point contre elle. »

Nourri des paroles sublimes de sa mère et fortifié par les grands spectacles pleins d’enseignements que lui offrait cette époque tourmentée, le jeune Mastaï grandissait en sagesse et en piété. À l’âge de douze ans il entra au collège de Volterra, en Toscane, dirigé par les frères des écoles pies qui se distinguaient par leur science et par la pureté de leurs mœurs. Il y fit de rapides progrès et acquit une rare éloquence de parole qu’il cultiva et conserva jusqu’à la fin de sa vie ; il s’y livra aussi avec ardeur à l’étude des beaux arts.

Après six années passées dans cette maison où il se fit remarquer par ses grands talents et par des vertus non moins grandes, il quitta à l’âge de dix-huit ans le collège de Volterra qui se souvient encore avec orgueil d’avoir abrité pendant six ans l’homme le plus remarquable des temps modernes.

On croit généralement qu’au sortir de l’école, le jeune Mastaï s’enrôla dans l’armée de Napoléon, disent les uns, dans l’armée autrichienne ou dans l’armée pontificale, affirment les autres. Rien de plus inexact. Pie IX n’a jamais porté les armes