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prince de la maison de Savoie ! Il ne suffit pas à la révolution de chasser les rois, toutes les fois qu’elle le peut, ou de faire tomber leurs têtes sous le couteau ; elle s’amuse à les déshonorer.”

L’envoyé piémontais sortit tout confus de la présence du Souverain-Pontife. Le même jour il fut témoin d’une scène qui a dû le convaincre, s’il n’en était pas déjà convaincu, de l’inanité des accusations de ceux qui prétendaient que le peuple romain, le vrai peuple romain, ne voulait plus du Pape. C’était à l’occasion de l’ouverture d’une fontaine publique que Pie IX avait fait construire sur la place des Thermes. Le Saint-Père voulut assister à cette cérémonie et il fut l’objet d’une ovation immense. Le 11 septembre, le Pape écrivit à Victor-Emmanuel la réponse suivante :

“Sire, le comte Ponza di San-Martino m’a remis une lettre qu’il a plu à votre Majesté de m’adresser ; mais elle n’est pas digne d’un fils affectueux qui se fait gloire de professer la foi catholique et s’honore d’une loyauté royale. Je n’entrerai pas dans les détails de la lettre même, pour ne pas renouveler la douleur qu’une première lecture m’a causée. Je bénis Dieu qui a souffert que votre Majesté comblât d’amertume la dernière période de ma vie. Au reste, je ne puis admettre les demandes que vous exprimez dans votre lettre, ni me rallier aux principes qu’elle renferme. J’invoque de nouveau Dieu et je remets entre ses mains ma propre cause qui est entièrement la sienne. Je le prie d’accorder des grâces abondantes à votre Majesté, de la délivrer de tout péril, et de lui faire part des miséricordes dont elle a besoin.”

Sans même attendre la réponse du Saint-Père, le roi de Piémont ordonna à ses troupes de marcher sur Rome. Le 11 septembre, une armée de 60, 000 hommes franchit la frontière et investit la capitale du monde, le 19. Le général de cette armée impie était un prêtre apostat, Cadorna ; le chef et l’armée étaient dignes l’un de l’autre. Cadorna aurait voulu entrer dans Rome sans coup férir, mais Pie IX demeura ferme et ordonna au général Kanzler de résister, mais uniquement dans le but de constater la violence. “Dans un moment où l’Europe entière déplore les très-nombreuses victimes d’une guerre entre deux puissantes nations, dit-il, on ne pourra jamais dire que le vicaire de Jésus-Christ, quoique assailli, ait consenti à une grande effusion de sang.”

Après avoir donné ces ordres, Pie IX se rendit à la basilique de Latran et de là à la chapelle de la Scala Santa, ou Saint