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ÉDITH.

Elle tomba, serrant d’une étreinte glacée,
La dépouille chérie entre ses bras pressée.
Amour et mort ! pouvoirs redoutés ! parmi nous
Hélas ! que vous avez de tristes rendez-vous !…

Bientôt du jour naissant la lumière irisée,
Pénétrant par degrés la brume et la rosée,
Rougit le front des cieux et la cime des pins.
Mille oiseaux, que de Dieu la main puissante a peints,
Brillent comme des fleurs sur la sombre verdure ;
Au souffle frais du jour, s’exhale un gai murmure
Des feuilles, des buissons et des roseaux mouvans,
Cette lyre vivante où modulent les vents !
Et la terre s’éveille à ce bruit qui s’élève.
Elle s’éveille aussi d’un long sommeil sans rêve,
Édith ! la veuve Édith ! et ses yeux égarés
Tombent sur des fronts noirs, des corps défigurés.
À cet étrange aspect, une lueur soudaine
Vers son malheur récent, vaguement la ramène.
Par un instinct subit son bras s’est étendu,
Comme vers quelqu’objet fugitif ou perdu ;
Puis, faible, elle retombe !… Elle s’éveille encore ;
Mais plus d’épais rameaux, de feuillage sonore
Plus de bois, sur son front, courbant leur dôme vert,
Où donc est-elle Édith ? Chez les fils du désert,
Sous le toit du chasseur ! Toit solitaire et sombre,
Qui ne voit point d’enfans se jouer sous son ombre !
Un vieux chef, qui la vit durant son court trépas,
L’avait à sa cabane emportée en ses bras.
Tandis que sur ce lit, où ses soins l’ont couchée,