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LA PAUVRETÉ.

Qui trouble le silence ou domine le bruit ;
Et soit qu’on ait cherché la retraite ou la foule,
Sentir le moment qui s’écoule,
Gâté par le moment qui suit ;

Aux chances du malheur, las enfin d’être en butte,
Invoquer à regret, trop faible dans la lutte,
Des appuis, dont peut-être on se fût tenu loin ;
Et, pour dernier fardeau, portant son propre blâme,
Apprendre que l’orgueil de l’âme
Fléchit sous le poids du besoin,

Cela, c’est être pauvre ! — Où donc est ta justice,
Seigneur ?… Qu’à tant de maux ton pouvoir compatisse !
Ou, voyant inféconds les dons de la beauté,
Ceux de l’esprit perdus, ceux de l’âme inutiles,
Nous dirons vaines et futiles
Nos croyances en ta bonté.

Est-ce donc qu’à nos yeux la suprême puissance
Témoigne, en prodiguant, de sa magnificence ?
De hautains courtisans, nobles voluptueux,
Ainsi de leurs manteaux secouaient sur l’arène,
Les perles, qu’aux yeux d’une reine,
Semait leur dédain fastueux !

Mais toi, Seigneur, par qui tout s’enchaîne et se classe ;
Qui dus marquer à tout son lot, sa fin, sa place ;
L’ordre est ta gloire à toi, comme tous dons parfaits :
Qui donc impunément dérangea ton ouvrage ?