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PREMIÈRE JOURNÉE.

» Se dit Peau-d’Âne, un charitable asile
» Pour l’étranger ?… » C’était un abattoir !

Elle veut fuir ; un doux bruit de fontaines
Attire ailleurs ses pas effarouchés.
Les animaux gisaient là par centaines,
Vifs, morts, plumés, par la patte accrochés ;
Œufs par milliers, poissons par myriades,
Beurre par monts, fleurs par faisceaux, salades,
Légumes frais ou secs, herbages verts,
Fruits variés qui, de rosée humides,
Offrent à l’œil leurs fraîches pyramides,
Les mille odeurs de la terre et des mers.

De Grand-Gouzier, enfin, le réfectoire !
Peau-d’Âne en outre a lu cet écriteau
Sur cent maisons : Ici l’on donne à boire !
Où ne se donne, en fait, un verre d’eau.
À chaque pas, d’un parfum de cuisine
Vingt soupiraux agacent sa narine :
« Ici, dit-elle, on peut braver la faim ;
» Quelle cocagne ! » À voir cette abondance,
Soupçonne-t-on qu’il soit tant de distance
Entre la bouche et le morceau de pain !

Peau-d’Âne un jour saura que la cohue,
Essaim confus qu’elle entend bourdonner,
Va, court, revient, s’agite, souffle, sue,
Le jour durant ; pourquoi ? Pour un dîner !
Un tilbury l’effleure de sa roue ;