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PEAU-D’ÂNE

Si du progrès la science est le temple,
Haussant toujours ses murs inachevés,
L’art a peuplé son panthéon plus ample
Des mille autels à tout culte élevés.
Si l’industrie allonge ou multiplie
L’ample manteau que le riche déplie
Tant que le pauvre en peut avoir sa part,
L’art, plus jaloux, n’admet point de partage,
Comme le dit ce vieux récit d’un sage,
À mon oreille arrivé par hasard :

Certaine race inquiète et mobile,
En son trésor avait certain bijou,
Joyau sans pair, aussi beau qu’inutile :
Double raison pour valoir un prix fou !
— Si nous brisions la pierre qui n’est bonne
Qu’à décorer au plus une couronne,
Chacun de nous en aurait un fragment :
Brisons ! brisons !… — Elle éclate en parcelles :
Vous possédez un millier d’étincelles,
Mais vous avez perdu le diamant !…

Le flot humain, hélas ! bat son rivage,
Gagnant ici ce que là-bas il perd ;
Mais Dieu bénit tout siècle et toute plage
De quelque fruit à nos lèvres offert.
L’âge qui luit a son lot comme un autre ;
Peut-être à l’homme est échu dans le nôtre
Plus de confort, d’aisance, de plaisirs !…
Mais, par malheur, le progrès dont je tremble,