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Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894, tome 2, partie 1.djvu/27

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rencontre souvent dans la paume, et qui indique, près de Mars, le sang-froid, et sur le mont de Vénus, la prison ou le couvent ; les barres, les traits ou petites lignes, et enfin le croissant, qui, s’il se trouve sur le mont de la Lune, indique une influence funeste exercée par les femmes.

Puis, vient l’observation des angles et quadrangles formés par les différentes lignes de la main, la mesure de la ligne de vie, partagée par les cabalistes en dix degrés de chacun dix années, et par d’autres en sept.

Ces indications sommaires suffiront pour donner une idée de la multiplicité infinie des présages qu’un charlatan ingénieux peut tirer de toute cette complication de signes particuliers à chacune des mains observées ; et l’ingéniosité de nos chiromanciens dépasse toute imagination ! Écoutons, par exemple, Desbarolles nous traçant le portrait d’un certain Jacob de La Cottière. Ce Jacob de La Cottière, un de ses plus chauds adeptes, était un journaliste qui, en retour de cette faveur du maître, publiait dans tous les journaux son éloge enthousiaste.

« Est-il artiste ? écrivait Desbarolles. Oui ! Par le doigt long du Soleil et par la ligne solaire sur le mont et par le doigt de Saturne qui se penche du côté du Soleil. Est-il ambitieux ? Il est ambitieux par Jupiter, le mont de Jupiter développé. Quelle est son ambition ? Il est simple, il est affable, et son doigt du Soleil, réputation, art, à la même hauteur que le doigt de Jupiter et que le doigt de Saturne, la fatalité !… S’il était militaire, il aurait, dans la cavalerie, les doigts très spatulés ; s’il était dans l’infanterie, les doigts carrés ; mais son mont de Mars serait très développé et ses oreilles très saillantes. Il est artiste, enfant d’Apollon ; il est capricieux, parce que la Lune (le caprice) domine son imagination, parce qu’il aime l’eau et les lacs qui sont sous l’influence dominante de la Lune… etc. »

Que penser d’une science qui aboutit à un pareil galimatias ? Et Desbarolles est le coryphée, l’oracle de la secte. Ab uno disce omnes.

Mais le plus surprenant, c’est de voir que non seulement les charlatans, mais même des lucifériens dogmatisants donnent dans de pareilles insanités ; tant il est vrai que toute raison non basée sur la foi est simplement de la déraison.

Je ne saurais mieux faire ressortir la vanité et la nullité de cette prétendue science telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, même depuis Desbarolles, qu’en citant le témoignage d’un homme bien placé pour l’étudier à sa source même, c’est-à-dire dans les traditions les plus authentiques des Bohémiens, le président de la Gipsy-Lore Society de Londres, M. Ch. Godefroy Leland. Il dit dans son livre intitulé Gipsy Sorcery (1891) :

« Il y a chez les bohémiennes ou diseuses de bonne aventure peu de science réelle de la chiromancie, telle qu’elle est professée dans la littérature ou la science de l’occulte. Il y a deux siècles, quand la chiromancie était sérieuse