Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/295

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n’a plus sa raison ; au surplus, il est telles personnes si directement protégées de Dieu, que la haine des occultistes envoûteurs ne saurait les atteindre.

Le mannequin mis en morceaux fut renfermé dans l’armoire, ainsi que les instruments de supplice. On avait en soin de ne pas détériorer la tête ; le reste du simulacre était facile à reconstituer.

Cependant, le Tribunal de la San-ho-hoeï avait seulement condamné et fait torturer le mannequin-missionnaire. Ce n’était point assez encore, paraît-il. La séance n’eut point été complète sans un outrage immédiat à notre Divin Sauveur. Mais, ici, ma plume se refuse à décrire ces horreurs ; à peine indiquerai-je de quoi il s’agit, en disant que ces monstres parodièrent la passion du Christ au moyen de l’animal immonde sous les traits duquel ils représentent le Fils de Dieu, Dieu lui-même. On mit en action ce qui est figuré sur une des peintures murales que j’ai reproduites (celle de la page 260). Flagellation, revêtement de la tunique rouge, couronnement d’épines ; puis, crucifiement sur la croix plantée un peu en avant de l’orient et à droite du Dragon-Baphomet ; ces infâmes remplacèrent, pour terminer, le coup de lance du centurion par un tir à l’arc ; et, au milieu des cris perçants poussés par la victime, cris dont les affiliés de la San-ho-hoeï se gaudissaient, les plus adroits d’entre eux s’amusèrent à cribler de flèches le porc sacrifié à leur haine infernale. Oui, infernale ! je ne trouve pas d’autre mot pour qualifier une telle monstruosité. Il n’y a que l’enfer qui puisse inspirer de pareils forfaits, d’aussi hideux et épouvantables sacrilèges.


Et les infamies n’étaient point terminées !… Après les outrages les plus abominables à la Divinité, les lucifériens chinois offrent à Satan, leur idole, un sacrifice sanglant, le sacrifice d’un des leurs, tiré au sort, qu’on immole et qui est considéré en quelque sorte comme un martyr. Cette vie humaine qui ne leur appartient pas, même la vie d’un des leurs, ils en disposent ; et voilà certes des âmes sûrement damnées.

Cette coutume cruelle, à laquelle j’ai déjà fait allusion, a pour but, dans la San-ho-hoeï, d’assurer ses membres, les uns vis-à-vis des autres, au point de vue de la discrétion : chacun d’entre eux sait que le sort peut le désigner ; il faut donc que chacun soit constamment prêt à prouver à ses frères qu’il méprise assez la vie et les souffrances pour braver les plus douloureux supplices, au cas où l’association viendrait à être l’objet des rigueurs de l’autorité et où il serait accusé d’en faire partie. À vrai dire, la San-ho-hoeï, pas plus que les autres sociétés secrètes qui pullulent en Chine, ne risque d’être en butte aux poursuites gouvernementales ; ces sociétés sont tolérées ; leur esprit est connu du