Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/339

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Il est facile de comprendre maintenant ce qui se passa : ce ne fut plus la guerre, ce fut une orgie de meurtres. L’armée indienne, commandée par le général Albert Pike, eut sa réputation promptement faite ; elle scalpait les ennemis sur le champ de bataille (absolument authentique, historique). Des atrocités sans nom furent commises par les troupes de Pike, dans les diverses rencontres avec les fédéraux. Le scandale fut si grand, notamment à la bataille de Pea-Ridge (7 mars 1862), où le général Pike conduisit en personne ses régiments de Comanches, Cherokees, etc., que les puissances étrangères s’émurent, et, sur les représentations de l’Angleterre qui menaça d’intervenir au nom des droits de l’humanité, le gouvernement séparatiste, présidé par Jefferson Davis, fut obligé de dissoudre ses troupes auxiliaires indiennes. Ceci, je le répète, c’est de l’histoire ; personne n’ignore, aux États-Unis, ce que je viens de rapporter.

Voilà donc, envisagée au point de vue maçonnique, la guerre de la Sécession ; voilà quelle fut l’action, quels furent les exploits des francs-maçons esclavagistes et de leur chef.

Il semble qu’après l’insurrection tant de crimes auraient dû recevoir leur châtiment. Sur le premier moment, le gouvernement fédéral eut, en effet, la pensée qu’il devait punir. Mais tout céda devant les grandes considérations politiques : le pays était fatigué, les populations réclamaient de part et d’autre l’apaisement ; une amnistie générale fut proclamée ; le procès commencé contre Jefferson Davis et autres instigateurs ou complices d’assassinats fut abandonné. Bien plus, Albert Pike, l’ex-commandant en chef de l’armée des Peaux-Rouges, fut maintenu dans son grade de général, à titre honoraire.

Pendant un an encore après la guerre, Pike exerça les fonctions de juge à la Cour Suprême de l’état d’Arkansas. Puis, il quitta définitivement Little-Rock, et, pour se rapprocher davantage de Charleston, siège du Suprême Conseil dont il était le grand-maître, il s’établit à Memphis, dans le Tennessee.

Memphis avait alors 25,000 habitants. Les francs-maçons y pullulaient. Le nom seul donné à cette ville américaine indique clairement que ses fondateurs étaient de vrais initiés. Cependant, les loges, avant son arrivée, pratiquaient toutes le rite de Royale-Arche et étaient sous l’obédience de la Grande Loge de Nashville, fondée en 1813. Albert Pike constitua à Memphis un atelier d’écossisme ordinaire et un aréopage spécialement voué au spiritisme, qu’il nomma le « Nouveau Serapeum ».

Par le chemin de fer, il se rendait, quand il voulait, à Charleston, où résidait en permanence son lieutenant Gallatin Mackey, le véritable administrateur du Suprême Conseil.