Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/465

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tion romaine, prit part à tous les événements de 1848 et 1849, et, la Papauté ayant finalement repris le dessus, il fut, comme les autres chefs révolutionnaires vaincus et justement punis, classé par les sociétés secrètes au nombre des martyrs. Une auréole luciférienne à Petroni, une auréole semblable à Pianciani, et voilà deux saints de la secte dont les premiers principes sont le crime et la profanation. À ce point de vue, Petroni et Pianciani faisaient bien la paire : la différence entre eux est que le second n’était pas un imbécile ; en revanche, il était un gredin fieffé, un profond scélérat.

Il fallut l’usurpation piémontaise et l’abstention des catholiques dans les votes pour faire de Pianciani un personnage. Il devint maire de Rome, député et vice-président du parlement italien.

Et, à propos de ce triste individu, il est de mon devoir d’apporter quelques rayons de lumière dans un incident anticlérical qui a fait grand bruit, mais qui n’a jamais été, je crois, complètement élucidé pour le public. Je veux parler de l’infect roman qui causa tant de scandale, non seulement en France, mais dans le monde entier ; car la maçonnerie donna le mot d’ordre de répandre partout cette œuvre infâme. Je respecte trop mes lecteurs pour écrire seulement le titre de ce honteux roman, tissu des plus abominables calomnies ; je me contente de dire qu’il s’agit du plus violent outrage qui ait été fait à la mémoire du saint pape Pie IX. On sait que l’un des grands remords de M. Léo Taxil fut de s’être constitué l’éditeur du libelle exécrable ; on sait aussi, aujourd’hui, le nom du journaliste qui l’écrivit, et qui naguère fut contraint d’avouer sa mauvaise action, accompagnant son aveu d’excuses qu’il faut croire sincères. Mais ce que personne ne sait, et, en tout cas, ce qui n’a pas été dit encore, c’est que l’écrivain qui prêta sa plume à cette infamie ne fut, dans l’affaire, qu’un simple scribe et que son rôle se borna à pasticher en français les faux renseignements provenant de Rome même. L’auteur, le véritable auteur, c’était le comte Luigi Pianciani, qui, pour inventer de nouvelles calomnies, quand son imagination perverse était à court, recourait, dans cette infernale besogne, à la collaboration de son digne collègue en maçonnerie, le F∴ Petrucelli della Gatina.

Pianciani a porté, dès cette vie, la peine de ses crimes. Le jour où je le vis pour la première fois, il me fit horreur ; son visage était rongé par une hideuse maladie ; il n’avait plus rien d’humain dans la figure ; il ne parvint jamais à se guérir complètement. La main de Dieu s’est appesantie sur lui et sur les siens. Pianciani, que l’on voyait si souvent à Rome se carrer dans un superbe landau le long du Corso et à la promenade du Pincio, a vu sa fortune s’écrouler tout à coup. Il est mort dans la misère, et tout récemment, sa veuve en était réduite, pour vivre, à vendre des