Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/867

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à tous les autres qui se trouveront complices desdits cas, jusques à sentence définitive exclusivement, nonobstant oppositions, appellations et récusations quelconques pour lesquelles et sans préjudice d’icelles ne sera différé même, attendu la qualité des crimes, sans avoir égard au renvoi qui pourrait être requis par ledit Grandier ; mandant Sa Majesté à tous les gouverneurs et lieutenants-généraux de la province et à tous baillifs, sénéchaux, vice-sénéchaux, prévôts, leurs lieutenants, maires et échevins des villes et autres officiers et sujets qu’il appartiendra, donner pour l’exécution de ce que dessus, toute assistance et main forte, aide et prison, si métier est et qu’ils en soient requis. »

Le premier soin de Laubardemont, à son retour à Loudun, fut de s’assurer de la personne de Grandier, et de le faire conduire sous bonne garde au château d’Angers. Puis, il fit saisir chez lui ses papiers, parmi lesquels s’en trouvaient de fort compromettants, sa correspondance avec Jean d’Armagnac, premier valet de chambre du roi, et l’un de ses protecteurs, le pamphlet de la Cordonnière et le traité contre le Célibat des prêtres.

L’information fut commencée sur-le-champ ; et, selon les termes de la commission donnée à Laubardemont, tout appel, requête et protestation des amis et parents du prévenu furent écartés et annulés. Un nouvel arrêt du conseil d’État du 31 mars lui renouvelait ses pleins pouvoirs, et lui ordonnait de continuer le procès, « nonobstant toutes oppositions, appellations ou récusations faites ou à faire… Le Roi lui en attribue de nouveau la connaissance, et icelle interdit au Parlement de Paris et à tous autres juges. »

Afin d’avoir Grandier sous sa main, Laubardemont le fit ramener en avril à Loudun, et enfermer dans une prison particulière, une maison appartenant à Mignon. Pour empêcher que les diables ne vinssent délivrer le magicien, on mura les fenêtres, et l’on fit sceller partout d’énormes barres de fer.

Alors, commencèrent les exorcismes. Les possédées, devenues plus nombreuses, furent séquestrées en des maisons séparées : les sœurs Claire de Sazilly et Catherine de la Présentation furent logées chez le chanoine Maurat ; Jeanne de Belciel, Louise de Jésus et Anne de Sainte-Agnès, chez M. de la Ville, avocat du couvent ; Élisabeth de la Croix, Monique de Sainte-Marthe, Jeanne du Saint-Esprit et Séraphique Archer, chez Nicolas Moussaut, oncle du procureur du roi ; les autres chez une tante de Mignon, la veuve Barot.

Des médecins furent appelés pour observer les possédées dans leurs crises ; on leur attacha un apothicaire et un chirurgien, l’apothicaire Adam et le chirurgien Mannoury. Puis, on procéda à la nomination des