Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/880

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droits : à la jointure de l’épaule, à celle du coude, et à celle du poignet, faisant un tour en chacune de ces jointures. Cela arrivait ordinairement quand on la contraignait d’adorer le Saint-Sacrement ; car alors elle appuyait le ventre sur la terre, joignait les pieds ensemble, et tournant les bras par derrière, elle joignait aussi les mains avec les pieds ; ce qu’elle ne pouvait exécuter sans faire un tour à chaque jointure.

« Leurs cris étaient semblables à ceux des damnés. On ne saurait jamais s’imaginer de quelle façon elles criaient, poussant des hurlements beaucoup au-dessus des forces des hommes les plus sauvages, et des bêtes les plus féroces.

« Les agitations des possédées étaient si violentes, qu’il fallait que les personnes les plus robustes les tinssent. Cependant, leur pouls était aussi tranquille que celui des personnes qui vivent dans un grand repos ; ce qui faisait clairement connaître que ces agitations étaient causées par des esprits d’une force supérieure…

« Une autre preuve très convaincante de la possession des religieuses, est qu’elles entendaient les langues étrangères, et parlaient de théologie, comme auraient fait d’habiles docteurs. Je suis témoin que les démons donnaient l’intelligence des langues à ces filles ; que très souvent elles pénétraient les choses les plus élevées, dont la connaissance n’appartient qu’aux anges. Elles m’entretenaient quelquefois des heures entières, me démêlant des questions de théologie très difficiles. Elles donnaient une solution nette à tous les doutes que je proposais à l’exorcisme. Comme il nous fallait être tous les jours cinq ou six heures à l’exorcisme, et qu’on ne pouvait pas toujours crier contre les démons, nous les entre tenions souvent en tête-à-tête, et ces entretiens familiers étaient toujours fort utiles… »

Le père Surin cite en exemple un long discours sur les choses spirituelles que leur tint Léviathan le jour des Rois 1636, aussitôt que le démon Isacaron fut sorti de la mère-prieure.

Un autre jour, il força ce même Isacaron de lui dire comment il se comportait pour détourner les âmes du service de Dieu.

Voici quelques fragments du discours d’Isacaron :

« Pour détourner les âmes de la voie du salut, et pour les corrompre, je me sers d’un moyen, qui est l’impureté. Asmodée et moi faisons de bons coups par ces tentations charnelles. La première conquête que j’ai faite m’a mis en grand crédit auprès de Lucifer, qui m’a toujours depuis donné des commissions sur la terre. Cette conquête fut la chute de Macaire le jeune, que je visitai dans le désert. Ce pieux ermite avait, pendant toute sa vie, servi Dieu avec une grande perfection. Je l’attrapai en mettant dans son chemin le soulier d’une femme et un mouchoir par-