Page:Taxil, Hacks, Le Diable au XIXe siècle, Delhomme et Briguet, 1894.djvu/903

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restreint, de sorte que les cas de manifestation du surnaturel diabolique paraissent presque disparus, aux yeux du vulgaire. On s’imagine, dans le public, que l’ère de ces manifestations infernales est close, ou à peu près ; c’est là une grave erreur. La vérité est que les possédés sont généralement ignorés. En effet, nous avons affaire à une prétendue science matérialiste qui nie de parti-pris le surnaturel et qui ordonnera des drogues, quand ce sont les exorcismes qui sont indispensables : un possédé passif se réfugiera donc dans les milieux où l’action divine seule, par le ministère du prêtre, pourra le débarrasser de son mal, contre lequel la médecine humaine est impuissante. Quant au possédé actif, bien qu’il n’ait plus à craindre de nos jours le bûcher, il ne se montre pas non plus à la foule ; car, Dieu merci, le luciférianisme n’est pas encore devenu la religion de l’État, et messire Satan se garde bien d’effaroucher le peuple et le déclare du reste inapte à recevoir sa lumière ; aussi est-ce dans les triangles palladistes, chez les old-fellows de la seconde classe, chez les satanistes indiens, chinois, américains, en un mot, dans toutes les sociétés d’occultisme pratiquant, même en Europe, même au cœur de Paris, qu’il faut aller chercher, pour les voir à l’œuvre, les magiciens et les sorcières du dix-neuvième siècle, c’est-à-dire les possédés actifs contemporains. .

Or, sauf la question de publicité des manifestations du surnaturel diabolique, nous sommes exactement au même point qu’au temps de Simon le Mage et d’Urbain Grandier. Et c’est pourquoi il est d’un haut intérêt d’étudier, sans se laisser émouvoir par l’absurde haussement d’épaules des sceptiques, l’obsession et la possession, envisagées au point de vue médical. Je vais plus loin : celui qui écrit ces lignes se fait fort de donner, quand on le voudra, la démonstration pratique de sa théorie, c’est-à-dire de prouver, envers et contre la Salpêtrière, et cela au moyen d’un sujet quelconque, la différence absolument capitale qui existe entre la possession et l’hystérie ou la folie.

La possession, de nos jours aussi bien qu’autrefois, s’opère de plusieurs façons.

Ou bien elle a lieu brusquement et n’est qu’éphémère, et il peut arriver qu’on ait été possédé sans le savoir ; on est alors inconscient ; on accomplit une mauvaise action, en ayant perdu pendant quelque temps la conscience, la notion du bien, du devoir ; artiste, on aura exécuté une œuvre abominable ; écrivain, on aura écrit des pages impies, qu’on regrettera amèrement ensuite. Personne, je crois, ne peut répondre de n’avoir jamais été en proie à une aberration de ce genre, et l’on cite tout bas de bons catholiques, des meilleurs, qui ont eu de ces défaillances, lesquelles autrement seraient inexplicables. Cette possession de courte durée, et