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« Qu’ils ont trouvé un nouvel idiome pour exprimer la nature de toutes choses, et que cet idiome deviendra un jour la langue universelle, parlée par toutes les nations, comme avant la Tour de Babel ;

« Que, par leur pouvoir, au jour marqué par le Très-Haut vers lequel se tourne le cœur du juste, le triple diadème du Pape sera réduit en poudre ;

« Que leur Collège, qu’ils nomment Collège du Saint-Esprit, ne peut souffrir aucune atteinte, quand même cent mille personnes, l’ayant découvert, lui donneraient l’assaut ;

« Qu’ils reconnaissent le Saint-Empire comme suprême puissance politique et apostolique, et qu’ils lui donneront plus d’or et plus d’argent que le roi d’Espagne n’en a tiré des Indes, tant orientales qu’occidentales, d’autant plus que leurs trésors sont inépuisables ;

« Qu’en souvenir de l’empereur Charles IV, mort en la bienheureuse année 1378, ils ont adopté le sceau impérial, tel que ce monarque le modifia, c’est-à-dire l’aigle à deux têtes, en remplacement des deux aigles employées par le Saint-Empire depuis Louis V de Bavière ;

« Qu’ils ont dans leurs bibliothèques plusieurs livres mystérieux ; dont un, qui est le plus utile après la Bible, est le même que le révérend père illuminé Rosenkreuz tenait en sa main droite au moment de sa mort ;

« Qu’ils ont enfin la certitude et la garantie, par la grâce du Très-Haut, leur Dieu tout-puissant, que la vérité de leurs maximes doit durer jusqu’à la dernière période du monde. » (Traduction du manuscrit de Guillermet de Beauregard, dit Bérigard ; archives du Souverain Conseil Patriarcal de Hambourg. Une copie latine, avec traduction hollandaise, se trouve aussi aux archives de la Loge Royale-Union, de La Haye, laquelle possède grand nombre de documents provenant de l’antique Collège de Rose-Croix établi dans cette ville dès 1619.)


Tandis que les Rose-Croix agitaient ainsi l’opinion en Europe, Thomas Vaughan avait entre onze et douze ans.

On aura remarqué, dans le document que je viens de reproduire, l’expression Sint-Empire ; il ne s’agit aucunement de l’empereur de l’époque, comme on pourrait le croire, ni de son gouvernement, mais bien du Sanctum Imperium des Rose-Croix. L’empereur était si peu le monarque protecteur de ces sectaires, qu’en 1624 il proscrivait Amos Komenski, le plus jeune des parfaits initiés présents au convent de Magdebourg.

J’ai dit tout à l’heure que mon ancêtre Thomas avait été, avec Komenski et Andreæ, l’exécuteur du plan de Fauste Socin. On va voir que Komenski fut beaucoup mêlé à la vie de Philalèthe, quoique cela soit peu connu.

Komenski, réputé surtout comme savant pédagogue sous le nom latin de Comenius, était l’un des principaux chefs de la secte des Frères