Page:Taxil, Mémoires d'une ex-palladiste parfaite, initiée, indépendante.djvu/147

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Moraves ; c’est lui qui a signé l’alliance avec les Sociniens. L’origine des Frères Moraves est antérieure aux effroyables guerres des Hussites, ces fanatiques qui avaient adopté pour religion les impiétés de Wiclef : leur petite église, dès longtemps dans les siècles du moyen-âge, haïssait la Papauté et la religion catholique romaine ; ils étalent fixés en Moravie, et, aussitôt que Jean Ziska se proclama vengeur de Jean Huss, ils s’allièrent aux Bohèmes massacreurs, formèrent un corps dans leur barbare armée, pillèrent et incendièrent avec eux les couvents, commirent partout les mêmes atrocités. Ils avaient juré l’extermination de tout le clergé catholique, l’assassinat du dernier moine et de la dernière religieuse. On sait que Jeanne d’Arc avait formé le beau rêve d’entreprendre, après la délivrance de la France, une croisade pour mettre un terme aux crimes de Ziska et des Bohèmes et Moraves qui massacraient sous ses ordres. Et voici que nous retrouvons les débris de la secte hussite unis aux Sociniens comme fondateurs de la Franc-Maçonnerie ! et voici que Jeanne semble, dans son autre vie, la céleste et glorieuse, avoir reçu de Dieu la mission d’anéantir la secte maçonnique ! Son rêve va-t-il donc se réaliser ?…

Quand les Taborites de Bohême et de Moravie furent vaincus par les Calixtins, ils disparurent, puis se reformèrent en petit nombre sous le nom de Frères Bohèmes de l’Unité ; enfin, chassés de Bohême et réfugiés en Moravie, ils s’appelèrent Frères Moraves, nom qui leur est resté. Mais leur hérésie était à bon droit suspectée de cacher un satanisme, secrètement pratiqué ; l’empereur rendit un édit contre eux, et ils durent quitter la Moravie. Komenski, qui avait été, jusqu’en 1616, professeur à Fulnek, se rendit au pays qui avait déjà accueilli les Sociniens ; il s’établit à Lissa, en Pologne (1624) ; un grand nombre de ses coreligionnaires vinrent l’y rejoindre. Alors, la communauté des Frères Moraves, dont il était devenu surintendant, vivait en la meilleure intelligence avec celle des Sociniens, communément appelés Frères Polonais. Pourtant, en ne considérant que les apparences, les deux sectes pouvaient paraître rivales ; l’union secrète était celle des chefs, d’une part Komenski, et les Blonski d’autre part, puisqu’en réalité le convent de Magdebourg avait scellé leur haine commune à l’Église par leur occultisme de Rose-Croix.

En 1631, Komenski réussit à faire imprimer à Prague son Labyrinthe du Monde, livre qui contient sa profession de foi religieuse, en phrases éclatantes de mysticisme, mais pleines de double-sens. On trouve aussi, dans cet ouvrage, une partie de ses mémoires ; il est bon de dire qu’il n’y raconte pas ses conspirations. C’est seulement dans un de