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Déjà, en ce temps, Ashmole préparait, non seulement son petit traité d’alchimie qu’il signa de l’anagramme « James Hasolle » et qui parut l’année suivante, mais encore son grand ouvrage, le Theatrum Chemicum, dont le premier volume parut en 1652. Il réunissait une collection d’anciens traités sur l’alchimie ; lié avec un vieux savant, devenu rose-croix, maître Backhouse, qui l’appelait « son fils », il avait eu son attention attirée sur divers livres de kabbale et d’hermétisme, dont plusieurs écrits en hébreu. C’est alors qu’il s’était mis à l’école du rabbin Salomon Franck, afin de comprendre les auteurs occultistes du judaïsme talmudique ; il avait donc appris les rudiments de la langue sacrée, et ces études le conduisirent à l’examen de quelques Targums.

En deux mots, rappelons que les Targums sont ces paraphrases chaldaïques de l’Ancien Testament, qui, en dehors de la traduction de la Bible, contiennent toutes sortes de légendes ajoutées par la tradition populaire. On sait que la captivité de Babylone avait été fatale à la langue nationale des juifs : le dialecte chaldéen s’était tellement mélangé au dialecte hébreu, qu’a leur retour à Jérusalem les enfants d’Israël parlaient une nouvelle langue et ne comprenaient plus leurs livres saints. Pour prêcher la Bible au peuple et la lui expliquer, les prêtres se livraient à des commentaires en langue plus ou moins chaldaïque ; or, il advint, par une suite toute naturelle des choses, que ces gloses orales finirent par être mises par écrit, et on les appela targum, interprétation.

Les auteurs catholiques antimaçons reprochent assez volontiers à la secte d’avoir créé de toutes pièces la légende d’Hiram, qui est le fond de l’enseignement donné au grade de Maître ; ils ouvrent la Bible et montrent que cet Hiram y est à peine nommé, et ils triomphent. En cela, le reproche est mal fondé, en grande partie.

Il faut être juste en tout ; portons un peu de lumière sur ce point.

Ni Ashmole, ni Thomas Vaughan ne disent d’où ils ont tiré la légende d’Hiram pour l’introduire dans l’enseignement maçonnique. Ashmole, passant pour être l’unique auteur du grade de Maître, a été, en raison de ce fait, traité d’imposteur ; c’est là une injustice.

Mon oncle, qui connaît à fond les langues primitives et qui en remontrerait à M. Le Chartier, a eu la curiosité de se livrer à des recherches. La légende d’Hiram, à peu de chose près, c’est-à-dire déduction faite de ce qui permet une interprétation luciférienne ; se trouve dans l’un des dix principaux Targums, attribué à Jonathan-ben-Uzziel.

Quand mon oncle me donna des leçons d’hébreu, — dont je n’ai guère profité, cela est à dire en passant, — il me traduisit la légende