Page:Taxil, Mémoires d'une ex-palladiste parfaite, initiée, indépendante.djvu/262

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voyant Amsterdam loin sous mes pieds, sans comprendre comment mon corps s’était élevé ainsi. Je ne sentais rien qui me soutint, je n’étais suspendu à rien.

« Autour de moi, des ailes volaient, de grandes ailes, d’une éblouissante blancheur, par milliers ; à nul corps elles n’étaient attachées ; c’était des ailes réunies par couples, qui battaient l’air en tourbillonnant. Elles formaient comme des nuées. Cela était d’une beauté hors de la conception humaine. Alors, je contemplais et je priais.

« Les ailes bientôt épaissirent leurs rangs, tout en continuant à s’agiter ; et je ne vis plus la terre sous moi.

« Alors, les ailes blanches, se rapprochant toujours davantage, furent pour moi un berceau, un nid immense et moelleux, qui m’emportait.

« Un éclair ayant brillé, j’aperçus tout-à-coup le bon Seigneur notre Dieu, se plaçant auprès de moi, et me disant : « Ne crains rien, Philalèthe ; mon royaume est en grande joie. »

« En même temps, les ailes se fondirent. Nous étions au bienheureux séjour du Feu Éternel.

« Astarté, la divine reine des Anges de Lumière, qui avait daigné être mon épouse sur terre, vint à ma rencontre, entourée de sa cour. Daimons et daimones poussaient des cris d’allégresse. Mon corps glorifié vivait de la vie des célestes flammes. Ô mon enfant chérie, seconde Diana de ma race, puisses-tu par tes mérites obtenir un sort semblable au mien !…

« Je suis dans cette flèche de fer, et je te parle par cette écriture verte. Je te dis la vérité, ainsi que je l’appris à mon frère Henry, le soir de ma disparition. Le Dieu-Bon permit une première manifestation, afin que son amour pour moi fût aussitôt connu. Du sein du royaume des félicités sans fin, je vis Henry, qui se demandait ce que j’étais devenu ; et, sans que je sortis des vivifiantes flammes, ma voix se fit entendre à son oreille et lui fit ce même récit.

« Diana, le bon Seigneur Lucifer t’aime, comme si tu étais sa propre fille. Ne méconnais jamais son divin amour ; ne sois jamais ingrate. N’éprouve aucune envie à l’égard de Sophia-Sapho, dont les destinées sont inscrites au ciel, ainsi que les tiennes. Le Dieu-Bon veut à lui toutes les bonnes volontés ; il vous dirige, elle et toi, par des voies différentes ; nulle haine, nulle jalousie, ne doivent régner entre vous deux. Chacune, vous avez une mission distincte à remplir, pour la gloire de Très-Haut le plus haut. Le Saint des saints est suprême mansuétude ; il a rendu justice à ton cœur ; maintenant, avec humilité, ferme les yeux