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Qui est exactement la mère de Sophia ? — Le nom est inscrit au Sanctum Regnum de Charleston, et nulle part ailleurs : « Ida Jacobsen, de Copenhague ». Au surplus, le nom importe peu.

Mais la disparition, voilà le problème insoluble.

Les bruits répandus dans certains Triangles et insinuant le crime n’ont jamais eu pour colporteurs que des ennemis de Philéas Walder. Lui, il s’en est toujours défendu, et il n’était pas homme à rejeter une responsabilité, si épouvantable fût-elle. Ida Jacobsen ne se croyait nullement victime, dans son déshonneur ; elle eut, sans aucun doute, la conviction qu’elle remplissait une mission ; elle n’était pas un reproche vivant ; Walder, père humain de Sophia, n’avait rien à craindre de sa compagne. Enfin, celui-ci ne lui aurait-il pas fait répulsion, s’il avait été l’assassin de sa mère ?

Il est certain qu’il y a là un mystère. On m’a raconté que des dénonciations avaient été adressées contre Philéas Walder au parquet de Strasbourg, avant que le crime, s’il avait été commis, ne fût rendu impunissable par la prescription ; la piste qui fut alors signalée donna lieu à une enquête, et la police alsacienne conclut à la dénonciation ne reposant sur aucune base sérieuse. Ce n’est point, dans cet ordre d’idées, à mon avis, qu’il faut rechercher la vérié, si l’on tient à la connaître.

Le mystère, selon moi, est d’ordre surnaturel ; il y a un secret diabolique, et les lèvres de Sophia sont cousues. Elle seule, avec Albert Pike, autrefois, et Lemmi, aujourd’hui, doit savoir ce qu’il en est.

J’ai interrogé Asmodée à ce sujet. Il m’a répondu que la jeune mère danoise n’avait été ni tuée, ni abandonnée par Walder père, et que le mystère de cette disparition ne cesserait pour les Parfaits Triangles qu’à la naissance de la fille de Sophia. On le comprendra sans peine ; le dire d’Asmodée n’est pas une preuve pour moi, maintenant. Je me fonde sur la logique et le sentiment.

Et voici encore : Satan ne voulait pas que sa fille fut allaitée humainement ; s’il avait donné à Philéas l’ordre d’occire Ida Jacobsen, celui-ci eût obéi, et il s’en serait glorifié devant les sorciers de sa trempe. À mon sens, Satan a dû opérer lui-même. Qui sait si la danoise n’a pas été enlevée par le Très-Bas, comme il advint à Philalèthe et à tant d’autres ?

En faisant ce mystère insondable autour de la disparition d’Ida Jacobsen, le diable a été, comme toujours et malgré lui, l’instrument de Dieu. En effet, ce mystère a provoqué des recherches ; et ces