Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/212

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moi, et qu’il appréciait tout à fait mon intelligence ; mais il montrait aussi, clairement, qu’il n’irait point se jeter la face contre terre s’il lui était donné lieu de faire preuve de quelque chose de semblable…

– Dites-moi, me demanda-t-il d’un ton de conversation sérieuse, plissant le nez fortement, quel livre de psychologie me faudrait-il lire ?

– Dans quel but ?

– On ne peut pas être instituteur sans connaître la psychologie. Avant d’instruire un enfant, il faut connaître son âme.

Je lui dis que, pour cela, c’était peu de lire une psychologie et que, pour un pédagogue qui n’est pas encore au fait des procédés techniques de l’enseignement de la lecture et de l’arithmétique, une psychologie me semblait un luxe pareil à de la haute mathématique. Il en convint volontiers et se mit à me débiter combien difficile et grave est la tâche d’un instituteur, combien il est malaisé d’extirper de la tête d’un jeune garçon le penchant au mal et à la superstition, combien il est difficile de le contraindre à penser de manière honnête et libre, de lui inculquer la vraie religion, l’idée de personnalité, l’idée de liberté, etc. Je lui répondis je ne sais quoi, à quoi il consentit ; il consentait, au reste, fort aisément. Tout ce qui était d’ordre intellectuel tenait, semble-t-il, assez peu solidement dans sa tête.