Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/241

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ai, mon cher, autrefois, tant ratiboisé d’argent, que je ne sais quel régal vous offrir…

– Je vous en prie, répondit Ouzélkov, ne vous dérangez pas ; je n’ai pas le temps de rien prendre. Il me faut aller tout de suite au cimetière pour examiner l’église. Je suis chargé de la réparer.

– À merveille ! fit Châpkine. Nous grignotons un hors-d’œuvre, nous buvons, et je vous accompagne. J’ai d’excellents chevaux. Je vous conduirai et je vous mettrai en rapport avec le staroste [1]. Laissez-moi tout arranger… Mais qu’avez-vous, mon ange ? On dirait que vous voulez vous écarter de moi. Me craignez-vous ? Asseyez-vous plus près… Maintenant, il n’y a plus à me craindre… Ah ! avant, effectivement, j’étais un habile gaillard, un bourreau d’homme ; il n’y avait pas à s’approcher trop près. Mais maintenant, plus calme que de l’eau, plus bas que l’herbe ! J’ai vieilli. Je suis marié. J’ai des enfants. Il est temps de songer à la mort.

Les deux hommes mangèrent, burent et repartirent dans un traîneau à deux chevaux pour le cimetière, hors de la ville.

– Oui, c’était un bon temps ! se ressouvenait Châpkine dans le trajet ; on se le rappelle et, en

  1. Président du conseil de fabrique. (T.)