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CHAPITRE XXIV.

Georgy devient un grand personnage.


Georgy Osborne menait une vie de prince dans la maison de son grand-père à Russell-Square. En qualité d’héritier présomptif de tout ce luxe dont il était environné, il occupait la chambre que son père avait eue autrefois. Sa bonne tournure, ses airs de grand seigneur, ses prétentions à l’élégance lui avaient concilié les affections de son grand-père. M. Osborne était aussi fier du fils qu’il l’avait été du père.

L’enfant vivait au milieu d’un luxe et d’une opulence ignorés de ses père et mère. Pendant ces dernières années, le commerce de M. Osborne s’était soutenu dans une voie de très-grande prospérité. Son crédit et sa considération dans la Cité n’avaient fait que s’accroître. Jadis il s’était estimé heureux de pouvoir mettre George dans un bon pensionnat, et il avait ensuite fait grand bruit du grade qu’il avait obtenu pour lui dans l’armée.

Dans ses projets d’avenir pour le petit George, il visait encore plus haut, il voulait en faire un gentleman, c’était là son idée fixe. Il le voyait déjà en imagination membre du parlement, et qui sait, baron peut-être ; tout ce que désirait le vieillard avant de mourir c’était de voir son petit-fils marcher déjà sur la route des honneurs.

Quelques années auparavant on aurait pu l’entendre traiter avec des paroles de mépris et de dédain tous ces rongeurs de livres et ces gratte-papier, troupeaux de cuistres et de pédants qui n’étaient bons qu’à abrutir la jeunesse à l’aide du grec et du latin, et qu’avec toutes leurs tournures doctorales un marchand anglais pouvait acheter à la douzaine. Désormais il déplorait du ton le plus pathétique le peu de soin avec lequel on lui avait fait faire son éducation, et dans de magnifiques tirades il faisait à George l’éloge le plus pompeux des études classiques.

Au dîner, le grand-père était dans l’habitude de demander