Page:Tharaud - Dingley.djvu/111

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une indicible angoisse étreignit le cœur de Dingley — une angoisse semblable à celle qui l’avait envahi, le jour où s’étant engagé sous un tunnel pour abréger sa route, il avait aperçu tout à coup les lanternes d’un train. Hypnotisé par les phares de la locomotive, il était demeuré immobile sur place, et les wagons où ses compatriotes lisaient leurs journaux déployés, avaient passé dans un vacarme d’enfer à deux ou trois pouces de lui… Même arrêt de sa vie, même durée effroyable du temps ! Il enfonça ses éperons dans le flanc de sa bête qui se cabra et n’avança pas. Une main l’avait saisie par le mors ; et l’homme, prenant le romancier pour un officier anglais, lui fit mettre pied à terre et le conduisit dans la ferme qui servait, cette nuit, de refuge à un commando.

Les moindres jeux de l’ombre et de la lumière que projetait une lanterne sur les murs de cette ruine, où l’on découvrait encore la trace des meubles déménagés, les ronflements des dormeurs, le froissement des corps qui se retournent, troublés un moment