Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Très bien dit, » s’écria Liu-Pou, et après avoir donné des ordres pour qu’on partageât aussitôt l’armée en deux corps, il rentra dans son hôtel. Or, comme il s’occupait de quelques préparatifs de départ, sa femme Yen-Chy lui dit : « Seigneur, où donc allez-vous ? — Je vais, d’après les conseils de Tchin-Kong, employer contre l’ennemi le stratagème..... — Ce Tchin-Kong, interrompit Yen-Chy, Tsao-Tsao l'a aimé comme son enfant, et pourtant il l’a abandonné ! Maintenant qu’il est à votre service, vous ne pouvez lui témoigner plus d’égards que ne le faisait son ancien maître. Allez-vous lui confier votre ville, abandonner votre femme, vos enfants, tout ce que vous avez de précieux, pour courir au loin avec votre armée ? S’il vous trahit à votre tour, moi, votre femme, vous aurai-je encore pour époux ! »

Liu-Pou changea d’avis, et ne sortit pas. Trois jours après, Kong étant allé le voir, lui dit : « Tsao entoure la ville des quatre côtés ; si vous ne marchez pas au plus vite contre lui, certainement notre position deviendra très difficile. — J’ai réfléchi, répliqua Liu-Pou ; au lieu d’attaquer l’ennemi au dehors, je préfère me défendre dans les murs. »

« On vient de me dire que Tsao, étant sur le point de manquer de vivres, ajouta le conseiller, en a envoyé demander à la capitale ; d’un jour à l’autre il peut les recevoir. Allez donc, général, allez avec vos meilleures troupes et vos officiers les plus braves, intercepter ce convoi !.... — Vous avez en vérité raison, » répondit Liu-Pou, et il alla dire à sa femme : « L’ennemi attend un convoi de vivres ; je cours l’intercepter et je reviens à l’instant ; calmez vos inquiétudes. »

« Si vous vous mettez en campagne, reprit en pleurant l’épouse alarmée, il vous faudra laisser la ville à la garde de Tchin-Kong et de Kao-Chun ; j’ai entendu dire qu’il y a entre eux quelque mésintelligence. A peine serez-vous parti, qu’ils ne seront plus d’accord dans le service que vous leur aurez confié ; et si quelque malheur arrive, si la ville est prise, dans quel asile vous retirerez-vous ? Réfléchissez bien, seigneur ! Ne vous laissez point aveugler par les conseils de ce Tchin-Kong. Une fois déjà,