Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/170

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Mais pendant cette entrevue, arriva aussi un émissaire de Youen-Chao ; Tchang-Siéou le fit entrer, et dans la lettre qui lui fut remise, il lut que Youen-Chao sollicitait également son alliance.

« Naguères, dit Hia-Hu à l’émissaire, vous avez mis des troupes sur pied pour attaquer Tsao ; d’où en est cette campagne ? — La mauvaise saison nous a forcés de l’interrompre, répliqua l’envoyé, et comme votre maître est avec le seigneur Liéou-Piao, le plus important personnage de l’Empire, voilà pourquoi nous venons demander à nous unir à vous. — Retournez au plus vite vers celui qui vous envoie, s’écria Hia-Hu avec mépris ; votre maître n’a pas pu soutenir son propre frère ; comment songe-t-il à prendre des étrangers sous sa protection ! » Et déchirant la lettre, il renvoya brusquement l’émissaire.

Tchang-Siéou qui considérait la position de Youen-Chao comme mieux affermie que celle du premier ministre, s’inquiétait déjà à la pensée que cette conduite violente lui attirerait la colère d’un ennemi puissant. « Le meilleur parti à prendre, répondit Hia-Hu, c’est de nous soumettre à Tsao-Tsao. — Mais, dit Tchang-Siéou, il a contre moi une ancienne rancune [1] ; peut-il oublier ce ressentiment ? » Le conseiller, pour toute réponse, exposa les trois motifs qui rendaient avantageuse une alliance avec Tsao : « Premièrement, ce ministre a reçu de l’empereur même l’ordre de ramener à l’obéissance tous les rebelles de l’Empire ; secondement, Youen-Chao est très puissant, aussi il ne fera pas grand cas de nous si nous nous rallions à son parti, tandis que notre soumission comblera de joie Tsao-Tsao, précisément parce que sa position est moins brillante ; troisièmement, l’intention secrète de Tsao est de se déclarer un jour le premier des vassaux [2] ; certes, il oubliera une injure personnelle, ne serait-ce que pour faire briller sa vertu dans tout l’Empire ! Telles sont les trois raisons qui doivent nous décider à accepter ses offres ; ainsi seigneur, n’hésitez pas ! »

  1. Voir plus haut, chap. II, l’épisode de l’enlèvement de la belle-sœur de Tchang-Siéou, par Tsao-Tsao.
  2. De prendre le titre de Pa, qui était accordé sous les Tchéou, au plus puissant des princes feudataires.