Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/248

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tuer le commandant ; celui-ci dans son trouble battit en retraite derrière les portes[1], les ferma, rassembla ses soldats au son du tambour et les plaça en armes, couverts de leurs cuirasses, à ses côtés. Ces préparatifs une fois faits, l’officier monta à cheval ; il ouvrit même les portes en criant à Yun-Tchang : « Passe si tu l’oses ! »

Sans répondre un mot, le guerrier fait reculer le char ; fouettant son cheval, le glaive au poing, il s’élance au-devant du commandant qui, dès la première attaque, tombe mort. Les soldats s’étaient dispersés : « Ne fuyez pas, leur dit le héros victorieux ; j’ai tué votre chef, mais je ne pouvais faire autrement et je n’ai rien contre vous ! » — Puis, comme ils se prosternaient devant son cheval, il ajouta : « Allez à la capitale et répétez ceci de ma part : Tandis que son excellence le premier ministre a pris la peine de venir me faire des présents pour la route, cet officier a voulu me tuer. Voila pourquoi je lui ai tranché la tête[2] ! »

Aussitôt il achemina les deux dames hors du passage, se dirigeant vers Lo-Yang (l’ancienne capitale). Déjà des soldats avaient averti de son approche Han-Fou, gouverneur de cette ville ; ce mandarin se hâta de rassembler ses officiers pour délibérer avec eux. « S’il n’a pas d’autorisation écrite, dit un de ces guerriers nonmé Meng-Wan, c’est qu’il est parti de sa propre volonté et nous ne pouvons le laisser passer sans être coupables ! — Un héros de sa trempe n’est pas facile à affronter en face, reprit Han-Fou ; deux des premiers capitaines de Youen-Chao[3] sont tombés sous ses coups. Usons plutôt de stratagème pour nous rendre maîtres de lui. »

Meng-Wan proposa de boucher la sortie du passage avec des

  1. Sur les passages, voir vol. I°, la note de la page 85.
  2. L’éditeur de l’exemplaire in-18 fait tout ce qu’il peut pour donner raison à Yun-Tchang. Aux phrases qui précèdent, il ajoute les notes que voici : — Il y avait bien là de quoi l’exaspérer. — Cet officier se montre poli, puis arrogant ; Yun-Tchang est d’abord respectueux, puis il a recours à la force — En voilà un de décapité ! — On pourra voir à propos des cinq officiers auxquels il fait éprouver le même sort, que le héros était vraiment forcé d’agir ainsi.
  3. Yen-Léang et Wen-Tchéou ;voir plus haut, pages 201 et 208.