Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/33

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acharnement sans que la victoire se décide pour l’un ou pour l’autre. Mais Hiuen-Té, voyant que les troupes du chef ennemi s’avançaient peu à peu de tous côtés, craignit quelque malheur ; il se hâta de faire battre la retraite sur les tambours d’airain, et rentra dans la ville avec son armée. Liu-Pou, partageant la sienne en quatre divisions, investit les quatre faces du rempart. Aussitôt Hiuen-Té appela Tchang-Fey et lui reprocha avec sévérité d’avoir attiré cette fâcheuse affaire en volant les chevaux de ce dangereux allié ; dès que celui-ci eut avoué que ces animaux étaient tous renfermés dans un couvent de Tao-Ssé, il s’empressa de charger quelques-uns des siens de les reconduire au camp de Liu-Pou. Ce dernier paraissait satisfait de cette restitution, mais Tchin-Kong lui dit encore : « Si vous ne tuez pas aujourd’hui Hiuen-Té, c’est lui un jour qui vous tuera ! Ne retirez pas vos troupes. »

Liu-Pou suivit ce perfide conseil et serra la ville de plus près. Se voyant réduit à la dernière extrémité, Hiuen-Té consulta ses plus fidèles officiers, My-Tcho[1] et Sun-Kien. « Seigneur, dit ce dernier, ce n’est pas à nous, c’est à Liu-Pou que Tsao en veut. Abandonner cette ville, courir droit à Hu-Tou, résidence de l’empereur, et nous jeter entre les bras du premier ministre Tsao-Tsao, puis lui emprunter des troupes pour battre et détruire Liu-Pou : voila ce que nous avons de mieux à faire. — Bien, reprit Hiuen-Té ; qui marchera à l’avant-garde pour nous ouvrir une route à travers cette masse d’ennemis ? — Moi, votre jeune frère, s’écria Tchang-Fey ; je suis prêt à combattre jusqu’à la mort ! »

Fey obtint le commandement du premier corps d’armée ; Kouan-Kong[2], celui du troisième, et Hiuen-Té se plaça au centre pour mieux protéger sa famille. Cette même nuit, à la troisième veille, profitant du clair de lune, ils simulèrent une sortie du côté de la porte de l’ouest, pour attirer les assiégeants de ce côté, et s’échappèrent par celle du nord. Deux divisions

  1. Voir vol. Ier, page 179 et suiv., l’histoire de My-Tcho.
  2. Il est souvent désigné dans le texte par son surnom de Yun-Tchang.