Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/364

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derrières et lui porte un coup fatal ; car, agissant de concert avec votre seigneurie, il ne rencontre plus qu’un ennemi déjà détruit. Les rebelles épuisés, harassés, disparaissent, comme à l’automne, les feuilles des arbres balayées par le souffle de la tempête. Ainsi, le ciel remet entre vos mains Youen-Chang lui-même ; au lieu de le prendre, votre excellence attaquerait les districts de Liéou-Piao, ces pays fertiles et prospères, ce petit royaume où le peuple obéit unanimement à un même maître !... Ne vous mettez donc pas de sitôt en mouvement de ce côté. Au contraire, les deux fils de Youen-Chao se font une guerre acharnée ; voila des troubles (qui vous offrent de véritables chances de succès )... Ils n’ont pas de vivres dans les greniers des cités, ils n’en ont pas non plus sur les routes ; voila des gens perdus ! Si vous attendez que l’année présente amène ses récoltes, pour entrer en campagne ; si vous laissez ces frères revenir de leurs erreurs, faire la paix entre eux, combien il sera difficile d’entreprendre une expédition dans ce pays ! Aujourd’hui, Youen-Tan envoie demander secours et appui ; n’y a-t-il pas la pour vous un grand avantage ?De toutes parts des rebelles lèvent la tête ; quand il n’y aura plus au nord du fleuve Jaune cet ennemi qui fait bonne garde, la rive septentrionale sera pacifiée, et six armées complètes se répandront dans l’Empire[1] ; et quand elles y manœuvreront sans obstacle, alors vous serez, seigneur, le véritable chef des vassaux ! Je supplie votre excellence de réfléchir à ces choses. »

Tsao-Tsao, enchanté de ce discours et sautant de joie, répondit : « Quel dommage, ô mon ami[2], que je vous aie connu si tard ! » Et il se hâta de faire reprendre à ses troupes le chemin de Ky-Tchéou. Averti que les armées du premier ministre passaient le fleuve Jaune, Youen-Chang s’empressa de revenir aves ses divisions dans la ville de Nié. D’un autre côté, Youen-Tan,

  1. Le texte chinois-mandchou dit en note : Six armées, c’est le nombre de celles que l’Empire met sur pied ; elles sont chacune de 12,500 hommes.
  2. Tsao-Tsao l’appelle par son petit nom (Sin-Tso-Ky), en signe d’amitié et pour le flatter.