Page:Theodore Pavie - Histoire des trois royaumes vol 2, Duprat, 1851.djvu/428

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rentré dans sa petite ville, il convint, d’après le conseil de Sun-Kien interrogé sur ce point, d’écrire à Liéou-Piao pour lui dévoiler ce qui s’était tramé contre lui. Sun-Kien chargé de porter le message fut introduit par Liéou-Piao qui lui témoigna sa surprise de ce que Hiuen-Té, honoré de la présidence du banquet, eût brusquement pris la fuite au milieu de la fête. Ce fut alors que Sun-Kien, tout en lui présentant la lettre explicative, lui dévoila les perfides projets de (son beau-frère) Tsay-Mao.

Transporté de colère, Liéou-Piao appela ce dernier et se mit à lui reprocher son crime... Le traître baissait la tête sans rien répondre. « Qu’on l’emmène, s’écria Liéou-Piao, et que sa tête tombe ! »

Mais sa jeune épouse (sœur du coupable) se précipita vers lui en demandant grâce, les larmes aux yeux. « Non, non, répondait Liéou-Piao, pas de grâce. » Il fallut que Sun-Kien lui fit entendre que si Tsay-Mao était puni de mort, son maître n’oserait plus reparaître dans la ville ; — et Tsay-Mao, vertement réprimandé, eut la vie sauve. Cependant Liéou-Piao voulut que son fils aîné[1] s’en allât, de compagnie avec Sun-Kien, porter des paroles d’excuses à Hiuen-Té. Celui-ci, flatté d’une pareille démarche, le reçut avec de grands égards ; et voyant les pleurs du jeune prince couler au milieu du repas, il lui demanda la cause de sa douleur.

« La seconde femme de mon père cherche toujours à se de faire de moi, répondit-il ; et je ne sais comment me mettre à l’abri de ses perfides desseins ! — Rendez-lui tous vos devoirs avec la plus scrupuleuse exactitude, répliqua Hiuen-Té, et vous écarterez ainsi toutes les occasions qui pourraient faire éclater son mauvais vouloir. » Le lendemain, le jeune prince prit congé du héros, en versant bien des larmes, et celui-ci, qui le reconduisait hors de sa ville de Sin-Yé, monté sur son fameux cheval Ty-Lou, lui dit en montrant l’animal : Sans ce coursier, je serais déja un habitant des

  1. Liéou-Ky, celui-là même dont Hiuen-Té avait soutenu les intérêts vis-à-vis de son père. (Voir page 392.)