Page:Thevet - La France antarctique - Gaffarel, 1878.djvu/169

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habitée, mais aussi estre fort peuplée. Ce que prouue Auerroes par le tesmoignage d'Aristote au quatriesme de son liure intitulé Du ciel et du monde. Auicenne pareillement en sa seconde doctrine, et Albert[1] le Grand au chapitre sixiesme de la nature des regions, s'efforcent de prouuer par raisons naturelles, que ceste zone est habitable, voire plus commode pour la vie humaine, que celle des tropiques. Zone torride meilleure, plus cômode et salubre que les autres. Et par ainsi nous la conclurons estre meilleure, plus commode, et plus salubre à la vie humaine que nulle des autres : car ainsi que la froideur est ennemie: aussi est la chaleur amie au corps humain, attedu que nostre vie n'est que chaleur et humidité, la mort au contraire, froideur et siccité. Voyla donc comme toute la terre est peuplée et n'est iamais sans habitateurs, pour chaleur ne pour froidure, mais biê pour estre infertile, comme i'ay veu en l'Arabie deserte et autres contrées. Aussi a esté l'homme ainsi creé de Dieu, qu'il pourra viure en quelque partie de la terre, soit chaude, froide ou temperée. Car luy mesme a dit à noz premiers parens : Croissez et multipliez. L'experience d'auantage (comme plusieurs fois nous auons dit) nous certifie, combien le monde est ample, et accommodable à toutes creatures, et ce tant par continuelle nauigation sus la mer, comme par loingtains voyages sur la terre.

  1. Liber cosmographicus de natura locorum. Fol. 14 B et 25 A.