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24 RÉVOLUTION FRANÇAISE.


tages ailleurs, soit pour un partage d’autorité qui n’aurait rien de fâcheux; car en laissant le Pacha au Caire, comme il y avait été jusqu’ici, et en héritant de la puissance des Mameluks, on n’avait pas grand chose à regretter. Quant aux habitants, il fallait, pour se les attacher, gagner la véritable population, c’est-à-dire celle des Arabes. En respectant les scheiks, en caressant leur vieil orgueil, en augmentant leur pouvoir, en flattant un désir secret qu’on trouvait en eux, comme on l’avait trouvé en Italie, comme on le trouve partout, celui du rétablissement de l’antique patrie, de la patrie arabe, on était assuré de dominer le pays et de se l’attacher entièrement. Bien plus en ménageant les propriétés et les personnes, chez un peuple qui était habitué à regarder la conquête comme donnant droit de meurtre, de pillage et de dévastation, on allait causer une surprise des plus avantageuses à l’armée française; et si, en outre, on respectait les femmes et le prophète, la conquête des cœurs était aussi assurée que celle du sol. Bonaparte se conduisit d’après ces errements aussi justes que profonds. Doué d’une imagination tout orientale, il lui était facile de prendre le style solennel et imposant qui convenait à la race arabe. Il fit des proclamations qui étaient traduites en arabe et répandues dans le pays. Il écrivit au pacha « La république française s’est décidée à