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DISCOURS

une dans l’espace, et j’ai besoin de rêver pour l’un et pour l’autre un vaste avenir.

Au milieu de vous, fidèles et constans amis de la science, permettez-moi de m’écrier : Heureux ceux qui prendront part aux nobles travaux de notre temps ! heureux ceux qui pourront être rendus à ces travaux, et qui contribueront à cette œuvre scientifique, historique et morale, que notre âge est destiné à produire ! La plus belle des gloires leur est réservée, et surtout la plus pure, car les factions ne sauraient la souiller. En prononçant ces dernières paroles, une image me frappe. Vous vous rappelez tous qu’il y a deux ans, un fléau cruel ravageait la France, et, atteignant à la fois tous les âges et tous les rangs, mit tour à tour en deuil l’armée, la science, la politiques. Deux cercueils s’en allèrent en terre presque en même temps ; ce fut le cercueil de M. Casimir Périer et celui de M. Cuvier. La France fut émue en voyant disparaître le ministre dévoué qui avait épuisé sa noble vie au service du pays. Mais, quelle ne fut pas son émotion en voyant disparaître le savant illustre qui avait jeté sur elle tant de lumières ! Une douleur universelle s’exprima par toutes les bouches : les partis eux-mêmes furent justes ! Entre ces deux tombes, celle du savant ou de l’homme politique, personne n’est appelé à faire son choix, car c’est la destinée qui, sans nous, malgré nous, dès notre enfance, nous achemine vers l’une ou vers l’autre ; mais je le dis sincèrement, au milieu de vous, heureuse la vie qui s’achève dans la tombe de Cuvier, et qui se recouvre, en finissant, des palmes immortelles de la science !

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