Page:Thiers Adolphe - Histoire de la Révolution française t1 (1839).pdf/335

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remplacer le roi par la république était trop hasardeux. Changer la dynastie était inutile, car à se donner un roi, autant valait garder celui qu'on avait ; d'ailleurs le duc d'Orléans ne méritait pas d'être préféré à Louis XVI. Dans l'un et l'autre cas, déposséder le roi actuel, c'était manquer à des droits reconnus, et envoyer à l'émigration un chef précieux pour elle, car il lui aurait apporté des titres qu'elle n'avait pas. Au contraire, rendre à Louis XVI son autorité, lui restituer le plus de prérogatives qu'on le pourrait, c'était remplir sa tâche constitutionnelle, et ôter tout prétexte à la guerre civile ; en un mot, c'était faire son devoir, car le devoir de l'assemblée, d'après tous les engagemens qu'elle avait pris, c'était d'établir le gouvernement libre, mais monarchique.

L'assemblée n'hésita pas, mais elle eut de grands obstacles à vaincre. Le mot nouveau de république avait piqué les esprits déjà un peu blasés sur ceux de monarchie et de constitution. L'absence et la suspension du roi avaient, comme on l'a vu, appris à se passer de lui. Les journaux et les clubs dépouillèrent aussitôt le respect dont sa personne avait toujours été l'objet. Son départ, qui, aux termes du décret sur la résidence des fonctionnaires publics, rendait la déchéance imminence, fit dire qu'il était déchu. Cependant, d'après ce même décret, il fallait pour la déchéance la sortie du