Page:Thiers Adolphe - Histoire de la Révolution française t1 (1839).pdf/373

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dans la noblesse. Les uns prétendent que c'est d'accord avec le roi ; d'autres croient que c'est à son insu. On assure qu'il y a un plan de formé ; que c'est par la Champagne ou par Verdun que le roi se retirera ou sera enlevé ; qu'il ira à Metz. M. de Bouillé est nommé, et par qui ? par M. de Lafayette, qui me l'a dit tous bas chez M. Jauge, à table. J'ai frémi qu'un seul domestique ne l'entendît ; je lui ai observé qu'un seul mot de sa bouche pouvait devenir un signal de mort. Il est froidement positif M. de Lafayette : il m'a répondu qu'à Metz comme ailleurs les patriotes étaient les plus forts, et qu'il valait mieux qu'un seul mourût pour le salut de tous.

« M. le baron de Breteuil, qui tarde à s'éloigner, conduit le projet. On accapare l'argent, et l'on promet de fournir un million et demi par mois. M. le comte de Mercy est malheureusement cité comme agissant de concert. Voilà les propos ; s'ils se répandent dans le peuple, leurs effets sont incalculables ; cela se dit encore tout bas. Les bons esprits m'ont paru épouvantés des suites : le seul doute de la réalité peut en produire de terribles. J'ai été chez M. l'ambassadeur d'Espagne, et certes je ne le cache point à la reine, où mon effroi a redoublé. M. de Fernand-Nunès à causé avec moi de ces faux bruits, de l'horreur qu'il y avait à supposer un plan impossible, qui entraînerait la plus désastreuse et la plus humiliante des guerres civiles, qui occasionnerait la séparation ou la perte totale de la monarchie, devenue la proie de la rage intérieure et de l'ambition étrangère, qui ferait le malheur irréparable des personnes les plus chères à la France. Après avoir parlé de la cour errante, poursuivie, trompée par ceux qui ne le sont pas soutenue lorsqu'ils le pouvaient, qui veulent actuellement l'entraîner dans leur chute…, affligée d'une banqueroute générale, devenue dès-lors indispensable, et tout épouvantable…,