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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

pondérance : on la lui refusa ; mais, en doublant sa représentation, on lui donna le moyen de la conquérir. Ainsi donc on ne cédait jamais que partiellement et seulement lorsqu’on ne pouvait plus lui résister ; mais alors ses forces étaient accrues et senties, et elle voulait tout ce qu’elle croyait pouvoir. Une résistance continuelle, irritant son ambition, devait bientôt la rendre insatiable. Mais alors même, si un grand ministre, communiquant un peu de force au roi, se conciliant la reine, domptant les privilégiés, eût devancé et rassasié tout à coup les prétentions nationales, en donnant lui-même une constitution libre ; s’il eût satisfait ce besoin d’agir qu’éprouvait la nation, en l’appelant tout de suite), non à réformer l’état, mais à discuter ses intérêts annuels dans un état tout constitué, peut-être la lutte ne se fût pas engagée. Mais il fallait devancer la difficulté au lieu d’y céder, et surtout immoler des prétentions nombreuses. Il fallait un homme d’une conviction forte, d’une volonté égale à sa conviction ; et cet homme sans doute audacieux, puissant, passionné peut-être, eût effrayé la cour, qui n’en aurait pas voulu. Pour ménager à la fois l’opinion et les vieux intérêts, elle prit des demi-mesures ; elle choisit, comme on l’a vu, un ministre demi-philosophe, demi-audacieux, et qui avait une popularité immense, parce qu’alors des intentions demi-popu-