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Page:Tiercelin - Bretons de lettres, 1905.djvu/273

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quitter sa ferme ; le fils a failli être soldat ; il lui a fallu travailler chez son cousin Ann Avellou ; enfin, là, il s’est marié : mais toute la famille a quitté Scaër. Ils sont sur la frontière de Gourin, à l’endroit nommé Kerguz. Aujourd’hui, j’ai dit au vieux Rodallec : « Prenez un journalier et laissez votre fils venir avec moi à Kerguz. » Le jeune homme ne demandait pas mieux. J’ai revu les landes de Gui-Scriff. Vers une heure nous étions à Kerguz. La vieille mère m’a aussitôt reconnu et son cœur s’est réjoui, car on me croyait mort. Pour Jéromik, il était à Gourin. Ainsi notre voyage est perdu  ! Nous allions partir, lorsqu’on nous dit : Voici Jérôme ! Nous nous sommes embrassés de bon cœur. Il m’avait écrit, il y a six mois, quand je lui annonçai mon arrivée. Même sa femme alla chercher de l’encre à Gourin, puis la lettre fut remise à une mendiante pour la mettre à la poste, mais la mendiante la supprima, de sorte que, moi n’arrivant pas, Jéromik avait sur moi les mêmes idées que sa mère, mais enfin me voici. La femme qui sait mon nom, s’appelle Maï ;[1] elle est douce et jolie et ils ont l’air de s’aimer. Le père est encore robuste et le grand-père comme un vieux chêne. On

  1. Maï Fornier, mariée à Jérôme Huiband.