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avant l’amour

gards irrités, une voix dure, des reproches maladroits et blessants.

Je me tenais immobile contre la cheminée. Mon parrain mordait sa moustache, et ma dame Gannerault, hors d’elle-même, allait de l’un à l’autre avec des gestes exaspérés.

— Eh bien ! je ne suis pas fâchée, mademoiselle, que vous ayez reçu cette leçon… Ça vous apprendra… Ah ! vous vous êtes offerte à ce monsieur, et il vous a refusée… Non, non quand j’y pense, c’est grotesque, c’est comique.. Il y aurait de quoi rire, s’il n’y avait de quoi pleurer… Car j’en pleurerais. Une fille que j’ai élevée dans les meilleurs principes ! Au premier compliment d’un petit musicien sans talent, elle prend feu, elle jure qu’il demande son cœur et sa main… Un peu plus, elle nous engageait dans des démarches ridicules, nous, les bonnes bêtes de parents !… Va, va, pleure, tu n’as pas volé l’humiliation que tu reçois… Est-ce que tu t’imagines que tu es facile à marier ? Mais, ma pauvre fille, on ne pense pas au mariage quand on n’a pas le sou… Est-ce