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avant l’amour

Il éparpilla l’herbe et les feuilles dans le lit du ruisseau.

— Tiens !… Il vaut mieux que je te laisse… Rechausse-toi, je vais en avant.

La gaieté était tombée et une sourde inquiétude, sans causes précises, pesa sur mon cœur. Je ne sais pourquoi, il feignit de m’éviter pendant une longue semaine.

Mais bientôt nos entrevues recommencèrent. Maxime devenait triste et je voulus le consoler. Il m’avoua des embarras d’argent ; la mauvaise volonté des camarades, la morgue des directeurs qui refusaient ou discutaient ses articles. Sa belle audace s’émoussait. Mon affection pour lui se fit prévenante et caressante et, à ma grande surprise, — mêlée d’un secret orgueil — je découvris que j’étais puissante sur cette âme indomptable. Oui, un mot, un geste, un sourire écartaient ou ramenaient les ombres sur le front de mon ami. Il l’appuyait parfois, ce front abattu, sur la main que je lui tendais, fraîche et sans fièvre, et ce contact