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avant l’amour

beaux s’éteignent et se rallument, nos regards scintillaient et mouraient. Je ne me refusais plus. Un invisible courant, coulant dans nos veines ses effluves électriques, dissolvait mes résistances et je roulais, je roulais de vertige en vertige vers des abîmes que je devinais terribles et délicieux… « Maxime ! — Marianne ! — À moi ! — À toi !… » Autour de nous frémissait la forêt nuptiale, complice et témoin de nos baisers. La bruyère offrait sa rude et odorante couche ; les pins exhalaient leurs aromes ; les sables, dans le soleil blanc, flamboyaient. Et la solitude, le silence, la contagion du désir me livraient aux inconscientes énergies de ma jeunesse. L’amour grondait en moi — non pas le complexe et craintif sentiment créé et cultivé dans les âmes civilisées, mais l’aveugle, la primitive volonté qui perpétue, dans les cris des vierges et l’étreinte des jeunes hommes, la vie antique et l’antique douleur.

— Oh ! tu m’appartiens, tu m’appartiens !

Je ne répondis pas. Ma destinée allait s’ac-