Page:Tinayre - L Amour qui pleure.djvu/64

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suivant, ils se promenèrent ensemble sous les chênes verts et les pins de la villa Borghèse, et Béatrice, apprivoisée, se laissa entraîner aux confidences.

Ils étaient assis, sur un banc en hémicycle, dans un bosquet d’arbres taillés qui leur versaient une ombre glauque et un parfum rude. Les dernières violettes bleuissaient l’herbe humide. Béatrice parlait et pleurait.

— J’ai été si pauvre, si seule, si malheureuse !

Son grand chapeau noir, sa robe noire, lui donnaient une beauté pathétique. Ses cheveux bruns devenaient roux dans tout ce noir, et sa main nue, traînant sur ses genoux, était une chose fragile, précieuse, que Georges n’osait toucher.

— Je n’ai pas eu de parents. Un vieux musicien d’orchestre m’a enseigné les éléments de mon art, et j’ai débuté, à quinze ans, sur les petites scènes de province… Je ne savais pas chanter… vous comprenez bien ? Je ne savais pas jouer. Je m’embarrassais dans mes jupes de simili-brocart… Et le directeur… Je ne peux pas vous parler de lui, oh ! non… Mais… vous devinez…