Page:Tinayre - La Chanson du biniou, paru dans Le Monde illustré, 1890.djvu/44

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— Comment cela ?

— Demain, dit-il, vers le soir…

— Demain, reprit-elle, étonnée.

Il continua, resserrant son étreinte, s’enivrant de la sentir si proche et voulant l’enivrer aussi.

— Oui, demain soir… Je partirai le premier, avec la voiture, comme pour prendre le train de Plouharnel, vous savez, le train qui passe à sept heures. Vous arriverez ensuite et nous n’aurons pas l’air de nous reconnaître. Alors, vous monterez dans un compartiment, seule. Je vous rejoindrai à la station suivante. La nuit même nous serons à Nantes ; le lendemain soir à Paris. Personne ne saura rien et…

Il n’acheva pas… Elle avait glissé dans ses bras, raide, froide, les mains crispées. Une sueur glacée couvrait son front, son cou, ses bras. Elle était livide. On eût dit une femme frappée par une mort subite.

Robert s’épouvanta, ne comprenant rien à cet évanouissement si rapide. Il ne savait comment ranimer Maria-Josèphe. Elle restait inerte sous ses baisers, sourde à ses appels, insensible à ses caresses. Alors, il se souvint qu’une petite mare, demi-bue par le soleil, achevait d’évaporer dans un coin du bois son eau saumâtre. Il courut y tremper son mouchoir et, soulevant Maria-Josèphe sur son genou, il posa la batiste humide sur les tempes de