Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/132

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Maurice balbutia :

— Josanne… Je voudrais…

— Quoi ?

— Il faut que je m’en aille, Josanne… C’est affreux de nous séparer ainsi… J’ai tant de choses à vous dire !… Si vous saviez !… Josanne, je voudrais être sûr que je vous reverrai… Je ne peux pas croire que nous nous quittons pour toujours…

— Je suppose que vous ne me ferez pas de visite de noces ! répliqua Josanne en se durcissant contre l’émotion. Nous avons dit les choses essentielles et définitives, ce soir… Et je n’ai aucune raison de continuer cet entretien…

— Nous serions morts l’un pour l’autre ?… Je ne vous reverrai pas… je ne reverrai pas Claude, jamais !

— Vous l’avez bien voulu !… Et puis, comment ?… pourquoi ?… Non !… non !…

Il surprit le tremblement de la voix, la crispation nerveuse de la main serrant la fourrure sombre.

Il pensa : « Quelle folie je fais !… » Mais, devant cette Josanne qui se dérobait, qui lui échappait, devant ce visage bouleversé tout à coup, et qui était bien un visage de femme amoureuse et tentée, il retrouvait la sensation de la conquête… Elle avait eu ce regard, ce geste, cet air de souffrance, le soir lointain où, dans une rue déserte, en revenant de chez madame Grancher, il lui avait dit :

« Je vous veux. Soyez toute à moi… »

Il n’imagina point qu’elle pût redevenir sa maîtresse, mais il voulut garder une prise sur elle, la tenir, de loin, par les souvenirs d’amour, par l’enfant, et qu’elle le sentît toujours présent dans sa vie, et