Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/195

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torsade de cheveux blonds, un manteau de drap clair, sous une ombrelle déployée, lui rappelèrent une rencontre qu’elle avait faite, un jour, dans le jardin des Tuileries, comme elle se promenait avec Noël… Elle revit une jeune fille blonde, en manteau beige, — une Américaine, sans doute, — qu’il avait admirée au passage. Et elle pensa :

« C’est singulier… Je n’ai pas le type physique qu’il aime… »

Elle éprouva un déplaisir vague, une jalousie sans objet, et, considérant les femmes riches et parées, assises dans les voitures, elle se sentit pauvre et chétive, avec sa robe noire qui n’était plus de saison…

Elle se demanda si Noël avait une maîtresse, et comment il pouvait aimer cette maîtresse, puisqu’il l’aimait, elle, de tout son esprit et de tout son cœur. Et soudain, malgré la fête charmante du déjeuner à deux, malgré les tendres paroles de son ami, elle eut envie de pleurer.

« Pourtant, pensait-elle, je ne veux pas qu’il m’aime… Et je ne peux pas l’aimer ! Il y a, entre lui et moi, trop de choses… l’ancien amour, l’enfant, ce terrible secret que Noël pressent, peut-être, puisqu’il réclame l’entière confiance… »

Confiance ou confidence ?… Certes. Josanne pourrait parler sans encourir le blâme de Noël, ou son mépris. Aucun homme n’était plus indulgent aux faiblesses, aux erreurs d’un cœur de femme. Il comprendrait tout ; il aurait pitié…

Mais comment parler ?… pourquoi ?… Noël ne convoitait point Josanne ; il ne s’était jamais permis la familiarité la plus légère, il n’avait offert et demandé que