Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/219

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geâtre des lampes. Et le crépuscule ne descendait pas du ciel : il semblait monter, comme une vapeur de la terre.

Mademoiselle Miracle serrait contre sa poitrine un châle de laine noire. Les brides de sa capote formaient un beau nœud sous son menton. Des gens, aux fenêtres des rez-de-chaussée, lui envoyaient un « bonsoir », au passage. Une vieille dame l’arrêta :

— Nous allons au mois de Marie, ma chère…

— Et moi aussi, ma chère, je vais au mois de Marie.

— Faisons chemin ensemble, voulez-vous ?

— Avec plaisir, ma chère…

— Et madame votre nièce y vient aussi ?

— Oui, ma chère. Elle part demain… Claude, ne traîne pas les pieds en marchant : tu vas user tes chaussures !

— Voilà les demoiselles Pierpont.

— Et madame Dejean, avec sa robe neuve…

— On dit que cet abbé, le jeune, le nouveau vicaire de Saint-Aignan, prêche si bien que c’est un délice de l’entendre…

— Il paraît… Claude, finiras-tu ?… Josanne, tu ne vois rien, tu n’entends rien !… Ton fils abîme ses souliers neufs.

Josanne tournait la tête :

— Claude, sois sage, obéis…

Le gamin, minuscule matelot en jersey marine, la regardait de ses yeux malins avec un air d’amour et de défi. La vieille dame disait :

— Ah ! les garçons !… les garçons !

— Des brise-tout, ma chère !

— Une ruine !…