Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/251

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mêmes galeries, naguère, Josanne avait feuilleté son livre. Il était en Sicile, dans ce temps-là : il espérait que Renée Moriceau viendrait le retrouver… Et Josanne, que faisait-elle ? Qui aimait-elle ?

Son mari ?… Non : d’après ce que Noël savait, d’après ce qu’il devenait, — à travers les propos de Foucart et certaines phrases de Josanne — cette jeune femme d’esprit hardi, de cœur passionné, dans la force de sa jeunesse, n’avait pu aimer d’amour Pierre Valentin. Elle avait ressenti, pour ce malade, une sorte de pitié maternelle. Mais Noël ne doutait pas que Josanne n’eût fait, hors de son ménage, la secrète expérience de l’amour et de la douleur… « Et quand bien même Josanne aurait eu un amant, pensa-t-il, elle aurait usé du droit que je ne conteste point, du droit qu’a toute créature de disposer de sa personne… Et elle n’en serait pas moins ce qu’elle est, avec les mêmes qualités, les mêmes vertus, — le mot n’est pas trop fort ! — bonté, désintéressement, courage… À la regarder vivre, chaque jour, je n’ai rien découvert en elle qui ne m’inspirât autant d’estime et de respect que d’affection… Alors ?… » Il avait la gorge serrée. « Évidemment, je n’aurais rien à dire si cela était, mais il y a tout de même des chances, des probabilités nombreuses pour que cela ne soit pas : d’abord, le secret d’une liaison n’est jamais si bien gardé que, dans une crise de passion ou de désespoir, un des amants ne laisse deviner quelque chose… Et, dans cette pétaudière du Monde féminin, personne n’a soupçonné Josanne… Foucart m’a dit, maintes fois : « Elle est vraiment vertueuse, cette petite !… Et, d’ailleurs, une femme