Page:Tinayre - La Rebelle.djvu/290

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et il a confié à Flory que je devenais… « une chipie !… » Il ne sait pas, ce Bersier, que je suis un objet sacré, une personne de dignité fort éminente, votre Josanne !… Ne m’embrassez pas comme ça, Noël !… Je suis trop nerveuse… Non !… Vous êtes fou ?…

Il l’avait saisie, d’un geste amoureux, suppliant…

— Josanne !… Si vous me refusez vos lèvres, laissez-moi mettre mon front là, sur votre épaule, et mon bras autour de vous… Et puis dites-moi tout ce que vous voudrez, des mots grondeurs que je n’entendrai pas, des mots câlins qui passeront comme des baisers sur mon âme… Ah ! comme je suis amoureux, ce soir, de vos yeux, de vos mains, de votre voix, de tout ce qui est vous et que j’ignore, et qui me tente… Je n’ai pas soixante ans, Josanne, et je vous aime tout entière et de toutes les façons… Méchante Josanne ! froide Josanne !…

— Noël, il ne faut pas…

— Un scrupule absurde nous sépare…

— Non, dit Josanne tristement. Ce n’est pas un scrupule absurde, c’est la crainte de gâter, par trop de hâte, notre bel amour, notre cher amour… Ma résistance, que vous me reprochez, n’est pas de la coquetterie…

— Elle vous est trop facile, cette résistance !

— Trop facile !… Vous croyez cela ?…

Il la vit rougir, dans la pénombre…

— Je n’ai pas soixante ans, moi non plus, et je vous aime… Mais j’ai peur !…

— Oh ! Josanne ! je ne suis plus très certain que nous ayons pris le meilleur parti…